SUIVI D’UNE COHORTE DE COUPLES SERODIFFERENTS DE 2012 A 2017 AU SERVICE DES MALADIES INFECTIEUSES ET TROPICALES, ABIDJAN, COTE D’IVOIRE

Diallo Z1 2, Mossou MC1 2, Doumbia A1 2, Moutarda WD1 2, Kouakou AG1 2, Coffie AP1 2, Eholie SP1 2
1. Service des maladies infectieuses et tropicales, CHU de Treichville, Abidjan Côte d’Ivoire
2. Unité Pédagogique de Dermatologie-Infectiologie, Département de Médecine et spécialités Médicales, Unité de Formation et de Recherche des Sciences Médicales, Université Félix Houphouët Boigny, Abidjan, Côte d’Ivoire

Correspondant : Zélica DIALLO
Service des Maladies Infectieuses et Tropicales, Centre Hospitalier Universitaire de Treichville, Abidjan, Côte d’Ivoire, BP V3, Abidjan, Côte d’Ivoire ; Téléphone : +225 07587537 ; E-mail : diallozelica2002@yahoo.fr

Résumé

Objectif : Estimer le taux de transmission du VIH au sein d’une cohorte de couples sérodi fférents à Abidjan, en Côte d’Ivoire.
Méthode : Etude observationnelle menée sur des couples sérodifférents au VIH suivis au Service des Maladies Infectieuses et Tropicales de Janvier 2012 à décembre 2017. Des cas index (infectés par le VIH) ont été enrôlés et les conjoints ont été suivi pendant au moins 12 mois avec un contrôle régulier de la sérologie VIH. Les données socio-démographiques, cl iniques, immuno-virologiques et thérapeutiques recueillies ont été analysées à l’aide des logiciels Excel 2016 et R STUDIO version 8.0.
Résultats : Au total, 117 couples, 51,3% hommes, d’âge médian de 41 ans, [EIQ :35-46 ans] ont été enrôlés, parmi lesquels 102 ont été suivis. Le tiers des couples (35,9%) était en relation stable depuis plus de 5 ans. 71,8% avaient au moins 5 rapports sexuels par mois. 51,3% n’utilisaient pas de préservati fs. 35,9% des cas index étaient au stade C de la classification CDC. La médiane des CD4 à l’enrôlement était de 181 cellules/mm3 [66-334]. Près de la moitié des patients (48,7%) était déjà sous traitement ant irétroviral à l’enrôlement avec une durée médiane de 4,70 années [1,83-7,06]. Au dernier bilan de suivi, le taux médian de CD4 était de 397 [278-580] cellules/mm3. La charge virale médiane était de 0,1 log10 copies/ml avec plus de la moitié des patients (58,8%) indétectables. La majorité des patients (74,5%) étai t sous traitement de première l igne dont 56,4% à base de TDF+3TC+EFV. La durée médiane de suivi était de 4,19 années EIQ [2,86-5,21] . Un seul cas de séroconversion a été observé chez les conjoints, soit un taux d’incidence de l’infection à VIH de 0,243 [0,232-0,248] pour 100 couples-années de suivi.
Conclusion : la transmission de l ’infection à VIH dans le couple est évitable par des méthodes préventives et un suivi adéquat du couple.

Mots-clés : Couples sérodifférents – Prévention – Traitement anti rét roviral –Transmission –
VIH.

Abstract

Objective: To estimate the rate of HIV transmission among a cohort of serodiscordant couples in Abidjan, Côte d’Ivoire.
Method: observational study conducted on HIV serodiscordant couples monitorring at the Department of Infectious, Tropical Diseases from January 2012 to December 2017. Index cases (infected with HIV) were enrolled, and spouses were followed for at least 12 months with regular monitoring of HIV serology. The socio-demographic, clinical, immuno-virological and therapeutic data collected were analyzed using Excel 2016 and R STUDIO version 8.0.
Results: 117 couples, 51.3% male, with a median age of 41 [IQR: 35-46 years] were enrolled, of which 102 were fol lowed. One-third of couples (35.9%) had a stable relationship for more than 5 years. 71.8% had at least 5 sexual intercourse per month. 51.3% did not use condoms. 35.9% of the index cases were at stage C of the CDC classification. The median CD4 enrollment was 181 cel ls / mm3 [66-334]. Nearly half of the patients (48.7%) were already on antiretroviral therapy at enrollment with a median duration of 4.70 years [1.83-7.06]. At the last follow-up, the median CD4 count was 397 [278-580] cells/mm3. The median viral load was 0.1 log10 copies/ml with more than half of the patients (58.8%) undetectable. The majority of patients (74.5%) were on first-line treatment, of which 56.4% were based on TDF+3TC+EFV. The median duration of follow-up was 4.19 years EIQ [2.86-5.21].A single case of seroconversion was observed in the spouses, an HIV infection incidence rate of 0.243 [0.232-0.248] per 100 pair-years of follow-up.
Conclusion: The transmission of HIV infection in the couple is preventable by preventive methods and adequate monitoring of the couple.

Keywords: Antiretroviral treatment – HIV– Prevention – Serodiscordant couples –Transmission

 

Introduction

De nombreuses personnes vivant avec le VIH/SIDA (PVVIH) ont une relation stable de longue durée avec un partenaire séronégatif pour le VIH. On qualifie ces couples de sérodifférents. Ces personnes séronégatives sont dites à risque d’infection à VIH en l’absence d’intervention car exposées au cours de chaque rapport sexuel au VIH [1]. En Afrique, une forte proportion de nouvelles infections à VIH se produit dans des relations stables [1]. Ainsi, le dépistage de couples, la prise en charge du partenaire infecté et un paquet de prévention biomédicale au conjoint séronégatif pour le VIH constituent une priorité de santé publique pour le contrôle de la transmission du virus [2,3]. Cette stratégie de prévention repose sur le traitement ARV du partenaire infecté par le VIH, la prophylaxie préexposition (PrEP) pour le conjoint VIH négatif et l’utilisation de Condom lors des rapports sexuels [4]. Les études de cohortes et les données des essais cliniques ont démontré que le traitement ARV est un excellent moyen de prévention, car la suppression virale confère une transmission quasi nulle du VIH [3,5-7]. Le Service des Maladies Infectieuses et Tropicales (SMIT) du Centre Hospitalier et Universitaire (CHU) de Treichville, centre de référence national de prise en charge des PVVIH, a mis en place le dépistage des couples dans la pratique de prise en charge globale des patients initiant le traitement ARV. Avec une prévalence hospitalière du VIH estimée à 43% dans ledit service, une cohorte de couples sérodifférents bénéficiant d’un suivi régulier [8] a été mis en place. L’objectif de cette étude était d’estimer le taux de transmission du VIH au sein de couples sérodifférents suivi au SMIT.

 

Patients et Méthodes
La présente étude a été une étude de cohorte observationnelle menée sur une période de 6 ans allant de janvier 2012 à décembre 2017, suivi au SMIT, à Abidjan en Côte d’Ivoire. Les patients infectés par le VIH ont été enrôlés dans l’étude et leur conjoint ont été invités à se faire dépister pour le VIH pendant la période de l’étude. Seuls les couples sérodifférents (un des partenaires infectés par le VIH et le deuxième non infecté par le VIH) ont été inclus dans cette étude. Nous avons retenu comme couples sérodifférents ceux répondant aux critères suivants : avoir : 1) une relation de couple régulière et stable (mariage civil ou concubinage) évoluant depuis plus de six mois ; 2) une relation sexuelle conservée depuis la connaissance du statut VIH positif du partenaire ; 3) le partage de l’information entre les deux partenaires ; 4) un traitement antirétroviral pour le partenaire infecté par le VIH. Tous les patients inclus devaient avoir plus de 21 ans (âge de la majorité en Côte d’Ivoire), être suivis dans la cohorte du SMIT et signer un consentement éclairé. Les couples séroconcordants n’ont pas été inclus dans cette étude.
Les données ont été recueillies par entretien en utilisant un questionnaire standardisé pour les cas index et de leurs conjoints. Les données cliniques des cas index, infectés par le VIH ont été complétées dans les consultations des dossiers médicaux des patients et dans la base de données des PVVIH du SMIT. Toutes les données collectées ont été transcodées sur le questionnaire de l’étude. Une sérologie VIH par des tests rapides (Determine et Stat-Pack) a été utilisée pour documenter la survenue de cas de séroconversion chez le partenaire du sujet infecté par le VIH. La sérologie VIH de contrôle a été proposée tous les 6 mois.
La saisie et l’analyse des données ont été faites à partir des logiciels Excel 2016 et R Studio version 8.0. Les variables quantitatives ont été décrites en termes de médiane et d’étendue interquartile (EIQ). Les variables qualitatives ont été décrites en termes d’effectif et de pourcentage. Les tests de Chi2 et exact de Fisher ont été utilisé pour la comparaison des proportions. L’incidence du VIH a été estimée avec son intervalle de confiance à 95% en considérant le nombre de nouveau cas de VIH observé pendant la période d’étude sur la somme de la durée de suivi de chaque partenaire non infecté. La différence était considérée comme significative, pour une valeur de p <0,05.
L’étude a été réalisée conformément aux bonnes pratiques cliniques et aux directives nationales en matière de recherche médicale. Le consentement libre et éclairé des patients a été obtenu lors de la visite d’inclusion. La confidentialité des données des patients a été respectée par attribution de numéro d’anonymat. L’étude a obtenu l’accord éthique de la cellule de recherche de l’Université Felix Houphouët Boigny.

 

Résultats
Données générales
La file active au SMIT durant la période de l’étude était de 9396 patients infectés par le VIH. L’échantillon des patients de l’étude à l’enrôlement (au début du suivi) était constitué de 117 couples sérodifférents, dont le patient index était soit régulièrement suivi dans le service des maladies infectieuses et tropicales pour la prise en charge de son infection à VIH, soit consultait pour la première fois. Au cours du suivi, 15 couples ont été exclus selon l’évolution du sujet index. Il s’agissait de 8 PVVIH qui ont été perdues de vue et 7 décédées (figure 1).

Figure 1: Diagramme de flux de la population incluse dans l’étude de 2012 à 2017

Caractéristiques sociodémographiques de la population d’étude à l’enrôlement
La population de cas index était composée de 51,3% d’hommes. La moyenne d’âge était de 41 ans. Près des trois quart (76,9%) des patients infectés par le VIH avait un niveau d’étude secondaire et exerçait une activité professionnelle rémunératrice. Les caractéristiques des partenaires séronégatifs sont résumées dans le tableau I.

Tableau I : Caractéristiques sociodémographiques de la population d’étude au SMIT de 2012 à 2017, n=117

 

Situation matrimonial et activité sexuelle
La majorité des partenaires infectés (soit 93,2%), qui cohabitait avec leurs conjoints, était en régime monogamique (96,6%) et le tiers (35,9%) vivait en couple depuis plus de 5 ans (tableau II). Concernant l’activité sexuelle des couples, 71,8% avaient au moins 5 rapports sexuels par mois et 4,3% ont déclaré ne plus avoir de rapports sexuels. Parmi ceux qui avaient toujours des rapports sexuels, 51,3% n’utilisaient pas de préservatif. Une utilisation régulière de préservatifs était observée chez 21 couples. Chez les couples qui n’utilisaient pas de préservatifs, les raisons majoritairement rapportées étaient l’oubli et le refus volontaire (51,7%).

Données cliniques, biologiques et thérapeutiques de la population index
Le tiers (35,9%) des patients index était au stade C de la classification CDC Atlanta. Les patients de l’étude étaient pour la plupart infectés par le VIH-1 (95,7%). Environ 77% d’entre eux avaient moins de 350
CD4/mm3 au bilan initial (tableau III).

Tableau II: Mode de vie et données évolutives des couples de l’étude, n=117

 

Tableau III : Données cliniques, biologiques et thérapeutiques sur l’infection à VIH à l’enrôlement des cas index (partenaire positif au VIH)

Le taux médian de CD4 à l’inclusion dans la cohorte était de 181 cellules/mm3 [EIQ=66-334]. Cinquantesept (57) sujets index (48,7%) étaient déjà sous traitement antirétroviral à l’enrôlement avec une durée médiane de 4,70 années [1,83-7,06]. Parmi eux, six patients étaient sous traitement de deuxième ligne. Sur le plan thérapeutique, la durée médiane sous traitement antirétroviral était de 5,32 années [EIQ=3,39-9,84]. La plupart des patients était sous un traitement de 1ère ligne, soit 74,5% et un patient est passé en 3ème ligne thérapeutique. Un changement de ligne a été observé chez 22 patients (21,6%). Ils ont été suivis pendant une durée médiane de 4,19 années [2,86-5,21]. Au cours du suivi, environ 24,5% ont été déclarés perdus de vue (tableau IV). A 12 mois de suivi, de la cohorte de couples, la majorité des partenaires VIH+ (82%) étaient contrôlés virologiquement.

Taux de séroconversion
Un cas de transmission du VIH a été observé chez des conjoints non infectés par le VIH, soit un taux d’incidence de l’infection de 2,4 [2,3-2,4] pour 1000 couples-années de suivi. Il s’agissait d’un couple dont
le cas index était de sexe féminin, non scolarisé et sans profession. Elle a été incluse dans la première année de l’étude et n’était pas encore traitée par les ARVs. Elle était infectée par le VIH-1, au stade clinique B de la classification CDC et avait un nadir de CD4 à 376 cellules/mm3. Le régime matrimonial était polygamique. Ils vivaient ensemble depuis plus de 5 ans et avaient 5 enfants. Concernant l’activité sexuelle du couple, les deux conjoints ont rapporté avoir eu plus de cinq rapports sexuels le mois précédent la visite d’inclusion, sans préservatif. Elle a été mise sous traitement antirétroviral à l’inclusion conformément aux recommandations de l’OMS. La sérologie VIH du conjoint a été contrôlée, plus de six mois après l’inclusion de l’index et était positive. Il a alors été enrôlé dans la cohorte du service pour sa prise en charge.

 

Tableau IV . Données cliniques, biologiques et thérapeutiques de l’infection à VIH au cours du suivi des cas index

 

Discussion

Il s’agit d’une des premières études réalisées chez les couples sérodifférents en Côte d’Ivoire avec le suivi de 102 couples dont un des partenaires était infecté par le VIH. Un cas de séroconversion VIH a été observé durant la période de suivi, soit un taux d’incidence de l’infection à VIH dans la population d’étude de 0,24 pour 100 couples-année.
L’étude HPTN 052 réalisée en juin 2007 dans 8 pays sur 13 sites de recherche avec le suivi de 1763 couples sérodifférents a rapporté une incidence du VIH de à 0,44 (IC95%: 0,26–0,69), dans le groupe du traitement antirétroviral précoce soit un total de 19 cas de transmission [9]. Dans une autre étude PARTNER réalisé en Septembre 2010, aucun cas de transmission du VIH observé au sein des couples sérodifférents ; le taux estimé de transmission était nul, avec une limite supérieure de l’intervalle de confiance à 95% de 0,30 par 100 couples-années de suivi |10].
Un des facteurs pouvant expliquer les cas d’infection à VIH au sein des couples sérodifférents reste la sexualité et l’utilisation des moyens de prévention biomédicales. La quasi-totalité (96,6%) des couples vivait dans un foyer monogame et 36% vivaient en couple depuis plus de 5 ans. Environ 72 % des couples ont rapporté avoir au moins 5 rapports sexuels par mois et 4,3% ont déclaré ne plus avoir de rapports sexuels. Des observations similaires en termes de stabilité des couples et de la fréquence des rapports sexuels ont été rapportées par Donnell en Novembre 2004 avec une durée médiane de l’union de 4,6 ans, une médiane de 4 rapports sexuels le mois précédent l’inclusion [11].
Les moyens de prévention au sein des couples sérodifférents étaient faibles avec seulement plus de la moitié des couples (51,28%) qui se protégeait. Dans l’étude HPTN 052, le pourcentage de rapports non protégés était de 5% chez les conjoints non infectés du groupe de traitement précoce [5]. Cette proportion était de 29% dans l’étude de Donnell. L’utilisation du préservatif au sein des couples stables restent difficile d’où la nécessité de proposer de nouvelle méthode de prévention biomédicale pour éviter tout risque de nouvelles infections. Les raisons évoquées de non utilisation du préservatif étaient entre autres l’oubli et le refus volontaire (51,7%)
Un autre facteur pouvant expliquer les cas de transmission du VIH au sein du couple est le niveau d’immunodépression du cas index. Plus le sujet est immunodéprimé, et plus le risque de transmission du
VIH est élevé. L’étude a noté que la médiane des CD4 était de 181 cellules/mm3, dont trois-quarts des cas index étaient sévèrement immunodéprimés <200 cellules/mm3. La situation est différente dans les autres études réalisées au sein des couples sérodifférents avec des médianes de CD4 plus élevées. Dans l’étude de Donnell, la médiane des CD4 était de 462 cellules/mm3 [347-631] à l’enrôlement des patients [11] et dans le groupe de traitement précoce de l’essai HPTN052, le taux médian des CD4 était de 442 cellules/mm3 [373-
522] [5].
La durée médiane du traitement était de 4,7 années [1,83-7,06]. Les patients naïfs (49,6%) ont été mis sous traitement dès l’inclusion conformément aux recommandations de l’OMS de 2012. Dans l’étude de Donnell, la trithérapie antirétrovirale a été initiée au cours du suivi chez 10% des patients infectés qui répondaient aux critères d’éligibilité d’alors [11,12]. Au dernier bilan de suivi, le taux médian de CD4 était de 397 cellules/mm3 et près du tiers de la population d’étude (32,4%) était immunocompétent. La charge virale (CV) médiane était 0,1 log10 copies/ml avec plus de la moitié de l’effectif (58,8%) qui était virologiquement contrôlée. Par ailleurs, on a noté une CV détectable chez 18% des patients avec une médiane de 4,62 log10 [3,94-5,68]. Dans l’étude HPTN 052, la charge virale plasmatique médiane chez les 27 participants qui présentaient une réplication virale à la dernière visite était de 4,9 log10 [2,6 à 5,8] [5]. Au plan thérapeutique, la durée médiane du traitement antirétroviral était de 5,32 années [3,39-9,84]. La plupart (74,5%) avait un traitement de 1ère ligne, et 22 patients (21,6%) ont changé de ligne thérapeutique, témoignant d’un échec thérapeutique. Dans l’effectif de Cohen, un échec virologique a été objectivé chez 5% des participants du groupe traitement précoce [5].
Les patients de l’étude ont été suivis pendant une durée médiane de 4,19 années [EIQ=2,86-5,21]. Au terme de la période d’étude, 25% de l’effectif étaient déclaré perdus de vue et deux décès sont survenus. Le pourcentage des perdus de vue est supérieur à celui de Donnell qui rapportait un taux de perdu de vue de 4% [6]. Cette différence serait due à une période d’étude plus longue. Dans notre étude, nous n’avons trouvé aucune différence significative associée à la sérodifférence dans le couple. Cela pourrait s’expliquer par le faible nombre de cas de séroconversion (un seul cas) observé dans notre population. Une étude menée en Chine sur 753 couples sérodifférents, observait 5 cas de séroconversions et retrouvait comme facteurs associés, une CV supérieure à 1000 copies/ml, l’absence de Traitement Antirétroviral et une utilisation irrégulière de préservatifs [12].
Cette étude présente quelques limites notamment, l’absence de mesure de la charge virale dans le sang et dans les différents compartiments qui est le principal facteur de risque de transmission du VIH au sein des couples. Nous n’avons pas non plus documenté la
prévalence des infections sexuellement transmissibles présentes par la réalisation des prélèvements cervicovaginaux chez les femmes.
Des études multicentriques en Afrique permettraient d’affiner les premiers résultats observés en Côte d’Ivoire. Des études pilotes devraient être faites pour initier la PrEP chez ces populations, qu’on peut considérer comme à haut risque d’infection à VIH.

Conclusion

Les partenaires séronégatifs des couples sérodifférents,sont à risque d’infection par le VIH, en particulier ceux dont les conjoints infectés ont une charge virale élevée et ne prennent pas de traitement antirétroviral. Ces couples jouent un rôle important dans le maintien de l’épidémie. Ils sont responsables d’une proportion élevée de nouvelles infections, surtout dans un contexte de pays à ressources limitées. Aussi, en plus du traitement antirétroviral du partenaire infecté par le VIH, il est essentiel d’offrir au conjoint séronégatif, l’ensemble de la prévention bio-comportementale et biomédicale ayant démontré leur efficacité dans la réduction de la transmission sexuelle de l’infection à VIH.

 

Contribution des auteurs : ZD et DWM ont conçu, coordonné l’étude et ont rédigé la première version du manuscrit. DA, GAK et CMM ont participé à la conception de l’étude. DWM et PAC ont participé à l’analyse statistique. ZD et SPE ont participé à la conception de l’étude et à la rédaction du manuscrit.

Tous les auteurs ont lu et approuvé la version finale du manuscrit.

Remerciements : Les auteurs remercient les patients et le personnel du Service des Maladies Infectieuses et Tropicales du CHU de Treichville.

Conflits d’intérêts. Les auteurs déclarent n’avoir eu aucun conflit d’intérêt dans la conception et la valorisation de cette étude

 

Références

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